top of page

3ème tableau : Culpabilité


Au milieu de l’année 2023, j’ai commencé une nouvelle toile. Je voulais peindre un des premiers rêves éveillés 

C’est un ciel d’orage dans un champ de blé 

Debout, sans recours, je vois la foudre s’abattre : 

Un flash blanc, une seconde d’éternité de souffrance et de décharge.  

Je tremble, je transpire, j’essaie de ne pas vomir. 

Je brûle à l’intérieur, plus rien n’existe que la violence. Plus rien ne fait sens. 

Le vent hurle des mots incompréhensibles que j’aimerais tant saisir. 

Le feu dévore et m’entoure, il va m’étouffer. Je suffoque. 

Je ne peux pas me réveiller. 

J’essaie de toutes mes forces mais mon corps ne peut pas bouger. 

Je ne peux pas me réveiller. 
Je le veux tellement que je crois que je me réveille et puis tout recommence : 

Le ciel, les nuages et la foudre. 

Les flammes se rapprochent, je sens la brûlure. 

J’enfonce mes pieds dans la terre, je prie pour être ensevelie. 

O terre nourricière, reprends-moi maintenant  

Reprends-moi avant de finir en cendres ! 

Un tremblement, une faille et je m’enfonce encore. 

 

Je reviens à moi au bord du malaise, soulagée mais sans dessus-dessous. 

Le rêve était si clair et si sombre, 

Il me poursuit après mon réveil. 

Rien ne sert de lutter contre le vent et l’orage. 

Qu’ils viennent et m’engloutissent à jamais ! 

Qu’ils fassent de moi un élément de leur rage ! 

Qu’ils ne se jouent plus de moi mais qu’ils fassent corps à mes angoisses ! 

Je veux être en paix.

 

J'ai peint un ciel d’orage au rouleau et un fond rouge avec dans l’idée de peindre des plaques sur la lave. J’ai procédé par strates avec du scotch. J'ai utilisé le pinceau, le couteau et des plumes pour la texture. Le processus a duré pendant plusieurs semaines, revenant puis abandonnant la toile au gré de mon énergie et mon inspiration. 

 

Sur le divan, je fais un rêve apaisant : une boule de lumière qui monte dans le ciel. J’ai dans l’idée de l’inclure dans mon tableau : des bulles de lumière dorée qui surgiraient entre les strates et qui s’élèveraient dans le ciel. Mais je ne vais pas au bout de mon idée, pas capable d’ajouter du jaune à cette unité de noir et de rouge, si puissante. 

 

Et surgit alors l’idée de peindre des yeux dans le ciel pour marquer le sentiment de culpabilité, celui du regard qui scrute, celui qu’on voit dans le miroir. Je m’appuie alors sur le travail d’Alain Urgal, un peintre et ami de mon père pour m’inspirer. 

Je teste et j'effectue des travaux préparatoires jusqu'à me lancer enfin dans cette première note figurative qui plus est, est humaine. J’opte pour le blanc dans l’idée d’éventuellement passer à la couleur ensuite, et il se passe quelque-chose d’intéressant en peignant : en voulant atténuer une ligne un peu trop prononcée à mon goût, je tapote avec une éponge pleine d’eau et l’eau coule tout le long du tableau, comme si l’œil pleurait. Cela me rappelle le rêve éveillé et je dilue de la peinture rouge pour faire pleurer les yeux de la lave ou du sang. Ainsi au lieu de monter, les lignes descendent.  

 

Je me rends sur le divan avec ma toile. La séance qui a suivi a été très intense : coupable de quoi ? Coupable d’être en vie, la faute originelle, la faute d’être venue au monde. 

bottom of page